ÔTEZ VOTRE GENOU, NOUS AVONS LE DROIT DE RESPIRER

Le 25 mai 2020, le monde a été horrifié par la mort de George Floyd dans les conditions monstrueuses.

Il était allé acheter des cigarettes comme il devait le faire certainement tous les jours. Un employé du magasin le soupçonnant de falsification appelle la police.

La suite on la connait, Georges est interpellé de façon brutale, alors que sur les images qui circulent on ne le voit opposer aucune résistance, le policier conclut cette arrestation musclée, en appuyant son genou sur le cou de Floyd, déjà à terre et de surcroit menotté, pendant 10 longues minutes, ignorant les supplications de celui :

 «SVP,  je ne peux pas respirer »

Ces dernières paroles de Georges sont tout sauf anodines. Pouvoir, c’est avoir le droit, la permission de faire quelque chose.

Ce policier a décidé qu’il avait le droit de contrôler l’air respirer par Georges, et qu’il pouvait l’en priver.

La stupeur passée, on s’interroge sur le pourquoi et le comment ? les choses avaient pourtant évolué dans le bon sens ?

Au risque de vous/nous décevoir, l’égalité que nous prônons, n’est que de façade.

Cet acte raciste saisit par les caméras, étonne certains peut-être, mais pour les Noirs, il fait partie du quotidien. Être Noir reste un combat perpétuel

Le genou de Derek chauvin appuyé sur le cou de Georges Floyd est la parfaite allégorie de l’oppression subit par des êtres humains, qui ont pour malchance de ne pas avoir la bonne couleur.

Ces scènes même si elles ne sont pas filmées, existent et non, elles ne se passent pas qu’aux Etats unis.

Ce qui a permis à Derek Chauvin de ne pas considérer Georges Floyd comme un être humain au point de lui ôter la vie sans sourciller, les mains dans les poches, s’est construit sur des années de déshumanisation de l’homme Noir.

Un processus qui a relégué le Noir au rang d’inferieur par des théories scientifiques, qui se sont déclinés en racisme institutionnalisé, au point de dévaluer la valeur du Noir.

Non, ce genou n’a pas bougé d’un iota.

Ce genou nous le ressentons quand dans les manuels enseignés aux enfants, Un pan important de l’histoire des Noirs est occulté, et qu’ils ne font leur apparition que pour illustrer le « tiers monde », et le « sous-développement », quand au lieu de donner toutes les raisons des problèmes que connaissent le continent Noir, on fait table rase de l’esclavage, du passé colonial (sauf pour en saluer son bien-fondé), l’exploitation, pour ne parler que de l’aide que les européens donnent aux pauvres Africains, en oubliant de mentionner qu’ils sont redevables à l’Afrique, pour avoir pillé ses richesses et sa culture.

Quand on dissimule le rôle important joué par l’Afrique pour libérer l’Europe du nazisme.

Quand on dit de façon erronée que l’Homme Noir n’a rien apporté à l’humanité, si ce n’est désolations, guerres et barbarie.

De par ce procédé, on implante dans le subconscient de ces enfants, un complexe de supériorité, qui se déclinera de diverses façons à l’âge adulte.

 Ce genou est mis sur le futur des enfants qui n’ont pas la bonne couleur, quand ils sont catégorisés, prédestinés à des métiers pour les maintenir au bas de l’échelle, et ce, peu importe leurs capacités intellectuelles.

Ce genou est ressenti dans les entreprises, quand même s’il en a les capacités, ne le Noir ne peut pas aspirer à certains postes. Et qu’on ne parle pas des exceptions, car elles ne font que confirmer la règle.

Ce genou nous le ressentons par les clichés véhiculés, les caricatures blessantes, auxquelles nous devons faire face et quand nos supplications sont rejetées ou considérées non recevables.

Ce genou est déjà sur notre cou à la naissance, car à cause de notre couleur, nous commençons notre vie avec un dossier à charges que nous devons passer notre existence à alléger, à démonter.

Imaginez commencer une course, en voyant que les autres compétiteurs sont placés à quelques mètres de la ligne d’arrivée, et que non seulement, c’est eux qui en définissent les règles, mais qu’en plus votre course est obstruée par des obstacles, par des gens qui vous lancent des pierres, vous jettent des quolibets au visage, vous devinez aisément qu’atteindre la ligne d’arrivée est quasi impossible? Quand vous avez le malheur de vous plaindre de vos conditions, on vous dit que vous devriez être content de participer à la course étant donné qu’avant, c’était loin d’être le cas. C’est cela être Noir. C’est être pris dans l’engrenage d’un système qui crée des potentiels Derek Chauvin, qui au nom de leur supériorité s’octroient tous les droits sur la vie ou le sort d’autres êtres humains et que nous devons affronter tous les jours.

Réagir face à l’injustice est notre devoir à tous, ne choisissons pas de détourner le regard, ou d’être témoin passif.

 Ce n’est pas seulement aux Noirs de s’attaquer à cette injustice, mais tous ceux qui participent à cette course doivent lutter à leurs côtés pour y mettre un terme. Comme le disait Toni Morrison : « si vous n’êtes grands que parce que l’autre est à genoux, vous avez un sérieux problème. »

 Quant à nous, Noirs d’ici et d’ailleurs, éduquons-nous et nos enfants, dépassons nos différences, approprions-nous notre histoire afin de contribuer à notre niveau, à restaurer notre place dans l’humanité. Personne ne viendra le faire en notre nom.

Il s’avère nécessaire de préciser que dans cette démarche, ne s’agit pas de repli identitaire, qui ne peut conduire qu’au déclin, mais plutôt à établir une base pour faciliter un rééquilibrage de l’histoire biaisée qui nous est servi à la pelle, et favoriser un échange équitable sans dominés et dominants.

Vous avez votre privilège, nous avons notre fierté. Ôtez votre genou de notre passé, de notre présent, de notre futur ou ne le ferons par tous les « moyens nécessaires » car comme vous, nous avons le droit de respirer.

Repose en paix George Floyd tu as vécu utile.

Le corona virus nous l’a fait à l’envers

Depuis quelques semaines, nous avons vu le cours de nos vies inversé par un intrus. Il avait pourtant l’air si inoffensif et lointain qu’on était loin d’imaginer, qu’il provoquerait un chamboulement à l’échelle mondiale. Vous l’avez deviné, il s’agit du coronavirus. Déjà le nom de la maladie qu’il provoque est tellement charmant, qu’il était difficile d’en avoir peur. La peste voilà au moins un nom qui foutait les jetons, donnait envie de se barricader, prendre ses jambes à son cou. Mais corona , qui ne voudrait pas d’une couronne ? seulement voilà, cette couronne au lieu d’être sur la tête, se greffe sur le système respiratoire et comme toute chose au mauvais endroit ,cause des dégâts considérables. Le couronnement suprême qu’on peut obtenir en cas de contamination est la mort.

Très vite , le virus a su traverser les continents, il  a démontré sa force de propagation en traversant le continent asiatique à la vitesse de l’éclair, pour s’inviter sur le vieux continent et faire trembler les piliers du colisée. L’Italie touchée, le virus poursuivit  son chemin en assiégeant l’Europe. Face au virus, la réponse commune européenne reste une illusion. L’Europe a clairement démontré qu’elle est un colosse aux pieds d’argile, une chimère monétaire, incapable de la moindre cohésion au-delà de l’Euro. Confinement complet, semi-confinement ? Chaque pays a le choix de prendre les dispositions qui lui conviennent. On va à la guerre en rangs dispersés.

Le mot d’ordre est néanmoins quasi-identique :se mettre en sécurité , et le lieu le plus sûr reste la maison.

On ferme les écoles, les crèches, tous les lieux de divertissement et de rassemblement.

 Les parents devenus enseignants de substitution , ont pu découvrir que c’ était un vrai métier. si nous avons du mal à gérer nos marmots, imaginez devoir en supporter une vingtaine.

Activités sportives, évènements , toutes les distractions nous permettant d’éviter de songer à la vacuité de notre existence ont été annulés.

Plus possible de rendre visite à des amis, d’ aller au cinéma etc.

On devra se contenter d’être nous-mêmes , 24 h sur 24 H , exercice pas facile quand on a appris à vivre que par le regard des autres.

Sartre disait que l’enfer c’est les autres, avec le confinement on découvre que l’échappatoire c’est les autres. Sans eux , plus de repères

Nous voila face à nous et aux êtres qui nous sont « chers » entre les 4 murs de notre geôle aseptisée.

Nous voila entrain de désapprendre  à nos progénitures les règles élémentaires de politesse que nous leur avons inculquées :

 « Non, il ne faut plus serrer la main »

 « Tenez- vous loin de tout le monde »

On lutte contre un ennemi invisible avec les moyens qu’on a , même si on sent qu’ils restent dérisoires.

Distance de sécurité obligatoire quand on fait ses courses, ou quand on rencontre quelqu’un. Le corona est un laissez-passer formidable pour les misanthropes. Plus besoin de se taper les conversations vides et creuses sur le temps, la couleur du pull de mamie , des questions existentielles, certes mais dont on se passe volontiers.

Tout compte fait, il reste important de souligner la chance que nous avons nous autres, d’avoir le confort d’un toit et d’être entourés. Tout le monde ne peut hélas pas en dire autant.

pour  certains,  la maison est tout sauf un lieu de repos  à cause des violences physiques ou psychologiques qu’ils y subissent.

L’Afrique épargnée au début de cette pandémie, provoquait l’étonnement des experts. Elle était pourtant connue pour être le berceau de tous les maux à défaut de berceau de l’humanité.

Mais même si elle  y rentre en trainant les pieds, L’Afrique fini par  faire son entrée dans la danse, au grand soulagement des oiseaux de mauvaise augure.

Les privilégies qui pour fuir le confinement imposé en Europe se rendent en Afrique, contribueront par leur inconscience à la prolifération de la maladie.

Ils oublient que sous nos cieux, un confinement comme c’est le cas en Europe est presqu’impossible, de plus, nos hôpitaux ne sont pas équipés pour faire face à cette pandémie.

Mais comme l’a souligné un tweet , largement diffusé sur les réseaux sociaux , les dirigeants africains ne pouvant plus se soigner en Europe,  auront tout le loisir de vivre les réalités auxquelles doivent faire face les populations ,du fait du sous-équipement des hôpitaux, tout en espérant  que cet épisode tragique les rapproche des populations qu’ils gouvernent.

Les médias nous font le décombre macabre des victimes, tellement contents d’avoir quelque chose à se mettre sous la dent. Le virus a réussi l’exploit de reléguer la crise des migrants et Daesh au second plan. On oublie que pendant cette période, les plus vulnérables sont plus que jamais ceux à qui tendre la main pardon …le coude…

Anonymes, célébrités, riches , pauvres, noirs, blancs ce virus ne fait aucune distinction , « tous égaux face au covid-19 »

Le fichu virus qui les dents longues, a rongé 2 grands baobabs africains, qui ont fini par tomber.

Aurlus Mabele précurseur du soukouss est mort le 19 mars 2020

Manu Dibango chantre du soul Makossa, affectueusement appelé papa groove , dont le fameux « mamase mamasa makossa  » a été samplé par Michael Jackson, et bien d’autres ,a déposé son saxophone le 24 mars 2020

De grosses pertes pour le continent Africain. Chers illustres disparus, puisse la terre de nos ancêtres vous accueillir. Nous vous retrouverons au quotidien par le biais de l’héritage que vous nous avez légué. « Les morts ne sont morts » disait Birago Diop.

Si le vecteur animal est la source privilégiée pour l’origine de ce virus , On n’arrive pas à s’accorder sur le coupable. Est-ce le pangolin ?ou la chauvesouris ? . Mon vote ira à la chauvesouris.

 Depuis le début, ce virus nous l’a fait à l’envers , en mettant nos vies sens dessus , sens dessous.

Profitons du fait que nous ayons la tête en bas, pour nous poser les bonnes questions, et obtenir les réponses adéquates afin profiter de notre vie, une fois à l’endroit.

Bon confinement, bonne introspection. Prenez soin de vous, prenez soin de nous, prenez soin d’eux.

Nation nègres et cultures, bible de l’histoire africaine.

Cheikh Anta Diop

Le livre « Nation nègres et cultures », est le fruit de recherches phénoménales, menées par Cheikh Anta Diop, afin de restaurer l’histoire de l’Afrique noire longtemps occultée.

À cette époque, le racisme scientifique, porté par d’éminentes figures, était enraciné dans la société occidentale, et avait attribué au blanc l’être cartésien par excellence, la paternité de toutes les civilisations, et défini le noir, comme un être primitif, émotif, incapable de la moindre logique.

Les Égyptiens de l’antiquité étaient noirs

C’est dans ce torrent de certitudes racistes, que Cheikh Anta Diop, jeune homme de 27 ans, va prendre l’idéologie dominante à contre-pied, en affirmant que les Égyptiens de l’antiquité, précurseurs de la civilisation et des sciences étaient des noirs. Il ne fait pas que l’affirmer, il le prouve.

Cette thèse fit l’effet d’un séisme, et comme elle dérangeait, il fallait le faire taire.

On ne peut cacher le soleil avec la main dit le proverbe africain. Même si l’université de la Sorbonne rejette sa thèse en 1951, Présence africaine éditera le livre en 1954.

Nonobstant les preuves qui ne manquent pas dans son livre, des scientifiques pétris de préjugés essaieront par tous les moyens, de jeter le discrédit sur son travail.

Jugées trop révolutionnaires, certains intellectuels africains avaient du mal à adhérer aux idées véhiculées dans le livre. Aimé Césaire fut l’un des rares à le soutenir. Dans « discours contre le colonialisme », il qualifiera le livre de Cheick Anta Diop de « livre le plus audacieux qu’un nègre n’ait jamais écrit »

Il a fallu attendre le colloque de l’Unesco en 1974, pour que la plus grande partie de ses thèses soient finalement reconnus « dans sa façon d’écrire, sa culture et sa façon de penser, l’Egypte était africaine » telles furent les conclusions de ce sommet.

Les preuves de la négritude de l’Egypte antique

Statue en grès du pharaon Montouhotep II (environ 2055-2004 avant JC), provenant de Deir elBahari, situé sur la rive gauche du Nil face à Louxor. Elle est exposée au Musée national égyptien au Caire.  (AFP – Luisa Ricciarini/Leemage)

Le combat fut de longue haleine, et pourtant, bien avant lui, la paternité de la civilisation Égyptienne avait été attribué à la race noire.

 Dans les témoignages de savants grecs comme Hérodote, Aristote, qui avait été des témoins oculaires, la peau noire et les cheveux crépus des Égyptiens étaient mentionnés.

Aristote disait d’eux qu’ils étaient « agan malane », pour décrire leur peau ce qui signifiait excessivement noir.

Au 18e s, le comte de Volney, historien français, devant les évidences accablantes, tira les mêmes conclusions :

 « Les Coptes sont donc proprement les représentants des Egyptiens et il est un fait singulier qui rend cette acception encore plus probable. En considérant le visage de beaucoup d’individus de cette race, je lui ai trouvé un caractère particulier qui a fixé mon attention : tous ont un ton de peau jaunâtre et fumeux, qui n’est ni grec, ni arabe ; tous ont le visage bouffi, l’oeil gonflé, le nez écrasé, la lèvre grosse ; en un mot, une vraie figure de Mulâtre.  

J’étais tenté de l’attribuer au climat, lorsqu’ayant visité le Sphinx, son aspect me donna le mot de l’énigme. En voyant cette tête caractérisée de nègre dans tous ses traits, je me rappelais ce passage remarquable d’Hérodote, où il dit “Pour moi, j’estime que les Colches sont une colonie des Egyptiens, parce que, comme eux, ils ont la peau noire et les cheveux crépus”, c’est à dire que les anciens Egyptiens étaient de vrais nègres de l’espèce de tous les naturels de l’Afrique.»

Une des autres preuves irréfutables du caractère nègre des anciens Égyptiens, étaient la couleur de leurs dieux. Osiris et Thot pour ne citer qu’eux étaient noirs.

Les représentations foncées des pharaons et les coiffures qu’ils arboraient, étayent aussi la négritude de l’Égypte antique. ( voir les représentations de  MENTOUHOTEP 1er et NÉFERTARI)

L’analogie va au-delà des traits physiques et capillaires.

Des valeurs propres à l’Égypte antique, comme le totémisme sont encore présentes en Afrique noire,

Une étude comparée linguistique, souligne des similitudes entre l’Égyptien et les langues africaines comme le Valaf et le Serere(liste non exhaustive).

  Au vue de ces arguments, la conclusion est sans appel : L’invention de l’écriture, des sciences nous la devons à des noirs. La culture grecque qui a inspiré la culture romaine, tire ses sources de l’Afrique nègre. « Pythagore est resté en Egypte pendant 22 ans, de 558 à 536 av. J-C. Platon y est resté de 399 à 387 av. J.-C… C’est par conséquent là-bas, aux pieds des prêtres Égyptiens, qu’ils ont puisé le savoir qui a fait leur gloire. L’Egypte pharaonique qui a été leur institutrice pendant si longtemps fait partie du patrimoine du Monde Noir. Elle est elle-même fille de l’Ethiopie. Et « dans sa façon d’écrire, sa culture et sa façon de penser, l’Egypte était africaine ».

Donner à l’homme noir la place qui lui revient dans l’histoire de l’humanité

Le fait que ce pan de l’histoire de l’humanité, ait été balaye du revers de la main, était lié au besoin de justifier la colonisation. On invente alors le nègre barbare, à qui on apporte la culture.

Cette propagande avait du mal à accepter que la société africaine était structurée et avancée, avant l’arrivée des colons. Que l’émancipation des femmes n’était pas un problème. La société africaine étant matriarcale, les femmes occupaient des postes de responsabilité, bien avant que ce fut le cas en Europe.

Le but de Cheikh Anta Diop en restituant cette vérité, était de redonner au continent oublié ses lettres de noblesse. Il ne s’agissait pas d’éveiller des relents sous-jacents de complexe de supériorité, pouvant déboucher sur des formes nazisme.

[…] la civilisation dont il [le Nègre] se réclame eût pu être créée par n’importe quelle autre race humaine – pour autant que l’on puisse parler d’une race – qui eût été placée dans un berceau aussi favorable, aussi unique” [Cheikh Anta Diop, Nations nègres et Culture].

Loin d’être un raciste comme voulait le décrire ses détracteurs, Cheikh Anta Diop était un grand humaniste, qui a été reconnu comme tel.

Son travail a consisté à combattre le racisme scientifique, et à prouver que l’intelligence n’est nullement liée à la couleur de peau. Il a remis en cause la conception de la race dominante, ce qu’on peut considérer comme un apport non négligeable à l’histoire de l’humanité.

L’héritage de Cheikh Anta Diop 

Des années plus tard, comment contribuons-nous à la propagation de l’héritage colossal de Cheick Anta Diop ?

Il prônait une Afrique unie, rassemblée, après s’être forgée une identité forte qui servirait de fondation solide. Où en sommes-nous avec le panafricanisme ?Avec l’adaptation de nos langues aux réalités et aux sciences comme il en a fait l’expérience avec le Valaf dans le livre ? Avec la décolonisation des mentalités ?

Force est de constater ,que ces sujets restent d’actualité.

La tâche qui nous incombe aujourd’hui, est de contribuer TOUS à l’émergence de notre continent, qui sera d’abord culturelle.

Dans le domaine scolaire, nous devons implémenter des manuels adapter à nos réalités.

 Adaptons nos langues aux réalités modernes. Il ne s’agit pas de bannir les langues coloniales acquises, mais revaloriser les nôtres et les adapter aux sciences modernes.

C’est les pieds solidement ancrés dans ses racines, libre de toute aliénation, détachée du joug du colonial, et de l’aliénation du colonisé, que l’Afrique connaitra sa vraie valeur, et qu’elle pourra prendre sa place sur l’échiquier mondial.

Cette refondation qui ne doit pas se faire dans une démarche belliqueuse, engendrera des africains fiers de leurs origines, qui prendront leur destinée en main.

Au secours!La jeunesse africaine se noie dans la méditerranée !

 Chaque année, des milliers de migrants en provenance d’Afrique, sont engloutis par la mer méditerranée, en tentant de rejoindre le continent européen.

Ce phénomène malheureux n’est pas sans rappeler, que déjà au XVe siècle, des Africains étaient enlevés de leur terre, pour servir de main d’œuvre gratuite en occident. Dans le cas récent, cette migration n’est à priori pas forcée.

Mais ces jeunes quittent ils volontairement le berceau de l’humanité ?

Lisons le récit de RM, (nom modifié par la rédaction) jeune ivoirien arrivé en Europe sur un bateau en provenance des côtes libyennes.

« L’horreur décrite est vraie …mais partir était la seule issue »

« D’emblée, je peux vous dire que tout ce que vous voyez à la télé est vrai » fut sa première phrase.

 Que signifiait « tout » ?

« Les morts, les femmes enceintes, les enfants, L’horreur décrite est vraie. » poursuivit-il l’air grave.

 RM est né en Côte d’ivoire, dans une famille aux revenus modestes.

Après des études, qui l’ont mené jusqu’à la terminale, il voulut passer un concours administratif, pour rejoindre la fonction publique, afin d’avoir une garantie de salaire et aider sa famille.

Dire que le graissage de pattes, fait partie intégrante des concours en côte d’ivoire, serait divulguer un secret de polichinelle.

Son père refusant de se plier à cette exigence, RM alla d’échecs en échecs.

Tous ses efforts pour se faire une place au soleil restèrent vains.

C’est dans ce scenario sans issue, que l’Europe fit son apparition.

Des amis à lui avaient tenter l’aventure, et force était de constater que leur situation était meilleure à la sienne.

Il décida alors d’essayer la case Europe, à défaut de mieux.

Malheureusement, son chemin croisa celui d’un arnaqueur qui l’abandonna à son sort au Maroc.

Retourner dans son pays lui étant impossible, il prit la décision d’aller en Algérie.

 Là-bas, il entendit parler de la route maritime pour l’Europe. Réticent dans un premier temps, il finit par céder.

De son récit, il découle que le réseau des passeurs est très structuré

Si les candidats à l’exil n’ont pas l’assurance d’arriver à bon port, les passeurs eux sont assurés, de recevoir leur argent peu importe l’issue.

Le coût du périple :550 euros (qu’il mit un an à réunir) et RM n’était pas le seul.

Un vrai parcours de combattant

Ils rejoignirent Ghadamès en Lybie à pied, et firent ainsi leur entrée dans la clandestinité. Ils ne verront presque plus la lumière du jour, et seront transportés dans des coffres de voiture.

Premier escale, Tripoli, où s’effectue la transaction financière entre les Algériens et les Libyens.

Si toutefois le passeur algérien se dérobait à sa tâche, le piège libyen se refermait sur le migrant qui était réduit à l’esclavage.

De Tripoli, départ pour Sabratha, où ils furent logés dans un dépotoir avec des femmes enceintes, des enfants pendant deux semaines.

 « Les sanitaires étaient si délabrés et sales, que personne n’osait les utiliser. Pour toute nourriture, on avait du pain sec et de l’eau, moi je n’avais pas faim. Je priais pour quitter la Lybie vivant. Des consignes nous avaient été donnés Nous devrions rester à l’intérieur, car à l’extérieur, on risquait l’enlèvement.

Le jour J, on nous conduisit à la côte.

On était une centaine à peu près.

Les passeurs demandèrent si quelqu’un parmi nous, était capable de piloter le bateau.

Un volontaire originaire de la Gambie se manifesta. Savoir conduire un bateau était un avantage car non seulement il garantissait une place, en plus le migrant ne devait pas s’acquitter des frais transport.

A la vue de la mer, un sentiment de peur m’envahit. Je ne savais pas nager. En cas de chute dans l’eau, mon sort était scellé. Confronté à cette éventualité, j’ai failli renoncer à mon projet, mais rebrousser chemin n’était plus possible.

En voyant que les femmes enceintes étaient les premières à prendre le bateau d’assaut sans avoir peur, je me suis dit que je ne pouvais pas me dégonfler. Je devais monter, et advienne que pourra.

Sur le bateau il régnait un silence pesant. Même les enfants étaient calmes. L’heure était grave et nous l’avions tous compris.

Le seul hic durant notre voyage, fut quand le moteur s’arrêta. Les réactions de panique manquèrent de faire chavirer le bateau.

La majorité n’avait pas fermé l’œil, Nous attendions la délivrance qui tardait à venir

Un bateau d’une ONG espagnole nous ayant repérés, vint à notre rescousse.

 Enfin sur ce bateau symbole de notre arrivée à bon port, les tensions se relâchèrent.

Nous y étions arrivés ! Nous étions vivants !

J’eu une pensée pour ma famille. J’avais envie de les avoir au téléphone pour les rassurer. »

“si c’était à refaire?… “

 

« Je ne saurai vous le dire, Je n’ai jamais imaginé dans ma vie rejoindre l’Europe en bateau, mais pris dans un engrenage, j’ai emprunté cette voie malgré moi.

Si j’avais eu du boulot, jamais je n’aurai quitté mon pays.

L’Europe est loin d’être l’Eldorado mais je continuerai à travailler dur. Mon rêve c’est de repartir au pays et faire des réalisations.

A tous ceux qui pensent à venir en Europe, je serai le dernier à les décourager mais je leur conseille d’éviter si possible la voie maritime car elle est vraiment dangereuse. »

Concrètement, que faisons-nous?

Croire que des individus soient prêts à affronter le monstre marin au risque de leur vie, sans avoir à le faire, c’est faire preuve d’un cynisme sans bornes.

Même si les chaines ne sont pas visibles, les contraintes n’en sont pas moins présentes, qu’elles soient économiques ou politiques.

Les campagnes de sensibilisation, les solutions que nous proposons, depuis notre tour d’ivoire pour soulager nos consciences, ne semble pas avoir un impact significatif sur ce fléau dévastateur.

Les chiffres de l’OIM (Organisation internationale pour les migrations) nous mettent face à notre impuissance à retenir notre jeunesse.

Les maux qui minent nos pays depuis les indépendances de façade ne sont pas non seulement pas combattus, mais entretenus par les régimes successifs. La corruption, la gabegie pour n’en citer que quelques-uns, et ils sont en partie ce qui pousse notre jeunesse à la fuite.

Quelles sont les solutions concrètes que proposent nos gouvernements ?

Que fait l’Europe à part s’ériger en forteresse ?

Que dire à notre jeunesse si rester ou partir ont pour finalité la mort ?

Mère à temps partiel, femme à temps plein

Credit :https://www.instagram.com/angodiva/?hl=nl

L’année dernière, je rejoignais officiellement, et en grande fanfare le groupe des mères indignes.

Mon crime? Décider de voyager sans ma famille.

Pour être honnête, je ne pensais pas que faire un voyage en solo, pouvait être considéré comme enfreindre les règles du guide « comment être une bonne mère ». Manuel se voulant utile, mis en place par des super femmes, pour toutes les femmes, même les ordinaires comme moi.

Alors dans ce manuel,  les règles majeures sont les suivantes:

-Être à la disposition de sa famille 7 jours sur 7.

-Lui concocter des menus sains et équilibrés

-Participer à toutes les activités extra-scolaires

Bref être omnipotente, omnisciente limite omni étouffante.

Non contente de ne remplir quasi aucun des critères énumérés ci-dessus, j’ai fait une entorse aux règles établies : j’ai délaissé ma famille pour une durée limitée.  L’affront !

 Un weekend sans les enfants? C’était limite mais encore pardonnable. Une semaine ? Là on est carrément en plein infanticide!

Quitte à être condamnée, pensai-je, autant bien faire les choses.

 Je partais pour 3 semaines.

Les réactions ne se sont pas faites attendre.

Il y avait celles qui se voulaient culpabilisantes

“mais tu ne pourras jamais faire 3 semaines sans tes enfants ”Tu ne tiendras pas le coup”

Il y avait celles qui se voulaient machistes, émanant de femmes.

“mais comment il va faire ton mari? “

Mais oui, heureusement qu’elles sont présentes et actives, pour défendre ces pauvres maris délaissés. Un altruisme dont le monde se passerait volontiers.

Et puis il y avait celles, qui de façon à peine voilée me signifiaient, que j’étais une mauvaise mère.

“moi, je n’aurais pas laissé mes enfants ne serait-ce que pour un weekend”

« Oui ! bien sûr ! mais personne ne t’oblige à le faire. Heureusement que je suis moi, et que toi tu es toi! » était ma réponse dans ce cas de figure.

Une année compte 365 jours ou 366 pour les bissextiles, alors ce ne sont pas 21 jours sans moi qui allaient créer un traumatisme irréversible chez mes enfants, bien au contraire, cela permettrait à ma famille de souffler. J’en étais convaincue.

Je suis le genre de mère qui ne porte pas son rôle comme une croix. Être maman, ne signifie pas enterrer la femme qu’on a été/qu’on est. Il m’arrive de céder à des « plaisirs coupables », comme de songer à mon bien être. S’occuper des autres est une bonne chose, pour pouvoir s’occuper des autres, il faut prendre soin de soi, alors prendre soin de soi est une bonne chose. Syllogisme cohérent non ?

Au nom de cette sacro- sainte maxime, je vais une fois toutes les six semaines, chez Erica m’allonger pour 3 heures. Erica n’est pas ma psychologue, mais mon esthéticienne. Passer trois heures chez elle me fait un bien fou. Je peux lui confier mes projets, mes envies, mes frustrations entre une séance d’épilation, massage ou de soin de visage.  L’avantage avec Erica est qu’elle est multitâche, et je ressors de chez elle délestée de bien plus que mes poils.

Au nom de cette même maxime, je m’autorise des activités n’ayant aucun rapport avec la maternité.

J’adore être mère, épouse, mais je ne pourrai remplir ses rôles que dans la liberté de pouvoir être moi.

Alors ce voyage ? eh bien, je l’ai fait, et ce fut une expérience formidable.

Je vous entends d’ici, non ! cela ne veut me dire que ma famille ne m’a pas manqué.

Je préfère vous rassurer, c’était loin d’être le cas. Au moins ça évitera qu’on rajoute un cœur de pierre à mon statut de mère indigne.

Mais, le manque n’est pas une punition, surtout quand on revient avec les batteries rechargées pour le combler.

Après la fin de ma retraite, alors que je m’attendais à être mise au banc des accusés au mieux, ou brulée vive au pire, grande fut ma surprise de constater, que c’était le contraire.

 J’étais, sans faire dans l’hyperbole, considérée comme une héroïne à mon retour.

J’avais du mal à comprendre ce revirement à 360 degrés, mais bien vite, les langues qui se mirent à se délier peu à peu, me firent réaliser qu’elles étaient nombreuses les mamans qui rêvent de cette pause.

Mais elles s’en privaient soit parce qu’elles se mettent une pression, et croient que sans elles le monde s’effondrerait, soit parce qu’elles n’en ont pas la possibilité, ou ont tout simplement peur du jugement des autres, et de leur entourage.

A leurs yeux, j’étais sans doute celle qui avait bravé les « interdits ».

 Mais à vrai dire héroïne je ne le suis certainement pas, mère indigne encore moins, je suis juste moi.

Une mère imparfaite qui fait du mieux qu’elle peut, s’autorise des pauses, une mère à temps partiel et une femme à plein temps.

COMME LILIAN THURAM, IL FAUT COMBATTRE LE RACISME À LA RACINE

2e match et 2e but pour Romelu Lukaku qui donne la victoire à l'Inter face au Cagliari de Nainggolan

LUKAKU  © Jonathan Moscrop – BELGAIMAGE

Lors d’un match de Série A à Cagliari en Italie, Une horde de supporters pousse des cris de singe à l’endroit du footballeur belge Lukaku.

Le crime de ce footballeur? son taux de mélanine élevé, sa couleur de peau.

Non, cette scène n’est pas tirée d’un livre d’histoire, ou d’un film de fiction.

Elle se passe en 2019.

Avant Lukaku, des joueurs comme Samuel Etoo l’international Camerounais ont eu droit à ce traitement.

Malgré les condamnations quasi unanimes, les joueurs noirs sur les stades sont toujours victimes de quolibets racistes, sans que les auteurs de ces faits ne soient efficacement inquiétés.

Dans le cas de Moise Keane, ces cris racistes furent même minimisés, par la fédération italienne de football, qui dans un rapport parlait de provocation, plutôt que de racisme.

Certains ultras de milans ont essayé, de nous faire avaler une énorme couleuvre, en ce qui concerne Lukaku. Selon eux, ces cris serviraient juste à déstabiliser l’adversaire, mais en aucun cas, ils ne sauraient être racistes.

Ahurissant non?

 « Le raciste a un complexe de supériorité » Lilian Thuram

Lilian Thuram © P. Lahalle L’Équipe

Interviewé par un journal italien, Lilian Thuram ancien footballeur, pour expliquer le comportement de ces supporters racistes, évoque leur complexe de supériorité lié à une histoire. Cette affirmation sortie de son contexte et montée en épingle, a suffi pour provoquer un tollé général.

En dépit de ses explications de texte sur différents plateaux, la tempête provoquée n’est pas prête de se calmer.

L’avalanche de réactions ne s’est pas faite attendre. Lilian Thuram était coupable de racisme anti-blanc.

Mais, au risque de décevoir les gens à l’indignation sélective, Lilian Thuram sait de quoi il parle, quand il évoque cette supériorité imprégnée dans la culture du blanc.

Il a étudié le sujet depuis belle lurette et a même mis en place une association https://www.thuram.org/ dans le but d’éduquer et combattre les stéréotypes, avec pour seule arme, la pédagogie.

Loin d’être raciste, il n’a fait que rapporter les faits comme ils sont.

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Le Racisme, une déclinaison de la hiérarchisation des races

Le racisme n’est pas apparu de façon soudaine, il a bien une histoire.

Les archives littéraires ou scientifiques regorgent de « chef d’œuvre » racistes, qui ont contribué, à reléguer le noir au bas de l’échelle.

Il n’y a qu’à lire « l’inégalité des races » d’Arthur Gobineau, pour se rendre compte de l’ampleur du mal. Et il n’y a pas que lui.

Des recherches à forte orientation raciste menées par des scientifiques, et des « esprits éclairés » de renom ont conclu, que le noir était le chainon manquant.

Ces démonstrations racistes, et subjectives sont la base de la hiérarchisation des races.

Sous couvert de science, le noir a été déclaré subalterne, ce qui a permis au blanc d’acquérir une supériorité.

C’est au nom de cette supériorité que l’esclavage s’est fait.

Cette supériorité fut aussi l’argument pour la colonisation.

C’est au nom de cette supériorité, que les noirs durent abandonner leur culture et traditions, pour adopter celle du colon.

C’est toujours elle qui permet de nos jours, que des intellectuels puissent trouver, que la colonisation fut positive pour le continent africain.

Elle a longtemps régi les relations entre les noirs et blancs, et a eu le temps faire son bonhomme de chemin dans les différents esprits. Même les plus érudits des intellectuels noirs, ne manquaient de faire pérenniser ces fausses idées à leur insu. La fameuse phrase du talentueux Senghor “la raison est hellène, l’émotion est nègre” en est l’illustration.

Elle est ressortie lors des débats par de nombreux africains contre des africains, sans qu’ils aient la moindre idée qu’ils font ainsi, l’apologie du racisme scientifique.

Tout raisonnement logique a été longtemps dénié au noir, dans l’intention de justifier sa servitude.  Le plus triste est, qu’on a fini par le convaincre lui-même du bien-fondé de cette démarche.

Ces séquelles laissés par ce racisme scientifique, sont bien présentes de nos jours.

L’image de cette Afrique pauvre, qui tend la main n’est pas faite pour arranger les choses.

Les cris de singe à l’endroit de joueurs noirs, ne sont qu’un prolongement de ce complexe de supériorité.

 « Arrêtez de ressasser le passé ! Le racisme c’est fini ! »

D’aucuns se demandent si on en fait pas trop à ce sujet. ”ce ne sont que des cris d’animaux” disent-ils.

On aurait pu penser pareille chose, si décrire le noir de façon simiesque, n’avait pas été une des bases du racisme scientifique.

Nous sommes tous égaux, certes, mais il ne suffit pas d’ordonner la fin d’une chose pour qu’elle disparaisse.

 Des injustices construites sur des thèses ne se volatilisent pas par enchantement.

Ces thèses ont été plantées comme des graines, et ont eu le temps de germer.

Il suffit de sortir de sa bulle, pour savoir que le noir n’est toujours pas traité en égal. Il doit montrer patte blanche pour être accepté, faire deux fois plus que le blanc, et nul besoin de mentionner qu’on attend de lui une exemplarité hors pair.

Dans la vie de tous les jours, être noir n’est pas de tout repos. Et même quand on excelle dans son art comme Lukaku, on n’est pas à l’abri d’être “remis ”à sa place.

Pousser des cris de singes à la vue d’un noir, ravive non seulement des plaies d’un passé récent, mais nous fait comprendre que les progrès au sujet de l’égalité des hommes, ne sont que de façade.

Le racisme est un fléau qui mine notre société, et pour l’éradiquer il faudra s’attaquer à la racine.

 Lilian Thuram a crevé l’abcès et l’odeur répugnante incommode sans doute, mais c’est une étape nécessaire.

Détourner le regard, se boucher le nez, faire la vierge effarouchée ne contribueront ni à faire avancer les choses, ni à nous faire taire.

Beaucoup se permettent de faire des raccourcis racistes de nos jours par ignorance.

Nommer les choses ce n’est pas faire du racisme anti-blanc.

Ce racisme anti-blanc, si toutefois il existait, est bien loin du racisme dont les noirs sont victimes.

 Chers caucasiens, Il est sans aucun doute très désagréable d’être indexé dans des fêtes par des noirs, ou d’essuyer des remarques sur votre couple mixte, mais sachez que les noirs vous envient ce traitement.

Eux, du fait de la couleur de leur peau, manquent de se faire lyncher, se voient refuser des boulots, des appartements, ou doivent se justifier en permanence.

Jamais des scientifiques noirs n’ont développé de théories comparant la race blanche à un animal, pour justifier une quelconque exploitation. Alors évitons de comparer l’incomparable.

Thuram n’a fait que dire la stricte vérité et si elle dérange, rejoignons son combat et éduquons les générations à venir pour une vraie égalité.

En passant, nous tenons à vous rassurer que nous ne prenons pas plaisir à aborder la thématique du racisme, nous sommes fatigués d’avoir à en parler. Il aurait été plus relaxant d’écrire un article sur la reproduction des hippocampes, mais malheureusement, les inégalités flagrantes dans la société dans laquelle nous vivons, ne nous laisse pas le choix.

Soutien total à Lilian Thuram !

Mugabe, la mort d’un héros africain

Portrait de Mugabe sur un mur quelque part au Zimbabwe Credit: AP: Tsvangirayi Mukwazhi

Robert Mugabe est mort à l’âge de 95 ans, le 6 septembre 2019.Après l’annonce de sa mort, mon réflexe instinctif fut de taper son nom, dans le moteur de recherche Google.

À ma grande tristesse, je vis, que son nom était associé, au mot dictature de façon consistante.

Des articles européens, le comparait même de façon subtile, à Hitler.

Pour être honnête, l’angle emprunté par eux, ne me surprenait guère.

Sur les réseaux sociaux, j’ai vu des journalistes, des africains, salir sa mémoire, ou célébrer sa mort.

Des années en arrière, j’aurais pu me joindre à ces célébrations, mais depuis peu, j’ai pris un autre chemin m’ayant conduit à remettre en cause mes points de vue, qui étaient à mon insu, basés, sur ce que les médias voulaient que je pense.

Quelques années plus tôt, Mugabe était pour moi la réincarnation du diable, car le seul portrait de lui, à moi accessible était, celui d’un dictateur sans scrupules, qui tuait son peuple.

La manipulation de l’opinion publique a été savamment orchestrée pour déformer son image. Par exemple, des photos de lui prises à des moments peu favorables étaient mises en exergue: On le voyait qui dormait lors de réunions importantes, faire des pitreries, ou tenir des propos sulfureux.

Vu à travers le prisme de l’occident, Mugabe était un dictateur fou, et, nous avons adopté cette description, sans émettre la moindre réserve.

Mais savions-nous réellement qui était Mugabe?

Mugabe, le symbole de l’Afrique au poing levé

Mugabe et Mandela
Credit: John Parkin/AP

Quand je me suis plongée dans l’histoire de Mugabe, grande fut ma surprise de découvrir, que son passé était des plus glorieux.

Mugabe s’est battu pour les droits des noirs au Zimbabwe ancienne Rhodésie.

A l’époque, en Rhodésie, la minorité blanche dirigeante, s’était assurée de la protection de ses privilèges, au détriment de la majorité noire.

Mugabe a fait plusieurs tours dans les geôles rhodésiennes pour avoir défendu son peuple. Sa plus longue période de détention fut de 11 ans.

Le rêve de la majorité blanche était de calquer leur modèle sur celui de l’Afrique du Sud. Mais c’était sans compter sur la résistance du peuple zimbabwéen.

Cette résistance farouche a conduit à l’indépendance du pays en 1980.

Mugabe a joué un rôle non négligeable dans l’acquisition de cette liberté fondamentale.

Ce passé reluisant est pourtant occulté et peu connu. Ses dernières années au pouvoir sont celles, qui eurent le plus d’écho, dans les médias, et furent amplifiées pour faire de lui une caricature grotesque.

Robert Mugabe ne mérite pas de prix nobel, pour ses dernières années au pouvoir, je vous le concède volontiers. Mais, s’est-il mis sans raison à manger « des blancs » au petit déjeuner? Saviez-vous, qu’à une époque, il était le chouchou des britanniques, et a même été décoré par la reine d’Angleterre en 1994?

A cette époque, il protégeait la minorité blanche en boutant les squatteurs, hors de leurs terres.

Qu’est ce qui a bien pu causer la fin de cette lune de miel?

La cause de la réjection de Mugabe par l’occident

Mugabe et la reine d’angleterre

Lors de son accès à la magistrature suprême du Zimbabwe, Mugabe a hérité d’un pays aux inégalités criantes, fruit de la colonisation britannique, officiellement dédiée à “aider les sociétés primitives africaines, à se transformer en états modernes, mais officieusement, à exproprier les locaux de leurs terres.

La conséquence de cette colonisation fut que la minorité blanche contrôlait toutes les ressources du pays.

Pour réduire cette injustice, Mugabe a mis en place une réforme agraire, soutenue financièrement par les Britanniques. Logique qu’ils contribuent à réparer le tort qu’ils ont causé. « Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. »

En 1997, pour des raisons floues, Tony Blair décide, de mettre fin à l’aide britannique, mettant Mugabe dans une situation délicate, qui le força à prendre des décisions impopulaires.

À propos de ce rétropédalage de Tony Blair, Mugabe prononça les phrases suivantes: « Nous n’avons pas chassé les blancs, nous avons repris nos terres conformément à l’accord avec les Anglais. Selon celui-ci, les terres devaient être reprises aux fermiers et remises aux zimbabwéens. Cela s’est fait dans le cadre constitutionnel.

Si L’Angleterre de Blair refuse de fournir les compensations prévues, devrions nous croiser les bras et dire ”Oh Dieu tout puissant, je prie au nom du père, du fils et du saint esprit? “

Bon sang! Non! Blair, Blair, qui est-il? Juste le premier ministre de l’Angleterre. Je suis le président du Zimbabwe. Raison pour laquelle nous lui avons dit “d’accord, c’est ton argent, garde-le. Ce sont nos terres, nous les reprenons ”Juste équilibre. »

Entre Blair qui a rompu sa promesse, et Mugabe qui a pris acte et réagi en conséquence, à qui imputer les dérives de la réforme agraire?

Le FMI s’est aussi mis dans la danse en asphyxiant économiquement le Zimbabwe. L’Union Européenne, sous couvert de défense des droits de l’homme, appliqua des sanctions ciblées à son régime.

Qu’est ce qui justifie un tel acharnement? Comment était-il censé réagir face à ces attaques?

Ne nous y méprenons pas, il a gagné son étoile de dictateur parce qu’il a opposé une résistance. Il n’a pas tendu l’autre joue.

Dans une Afrique habituée à courbe l’échine, il n’eut pas peur d’élever la voix pour défendre les intérêts africains.

Il fut l’un des seuls présidents africains à défendre Kadhafi quand la Lybie fut attaquée par la France de Nicolas Sarkozy. On peut lui donner raison quand on voit que la Lybie est passée de fierté africaine à un no man’s land.

Défier l’occident, c’était signé son arrêt de mort.

De façon soudaine, il quitta la case des génies politiques, pour rejoindre celle des dictateurs.

La vérité est que, si on base l’opinion qu’on se fait d’une personne sur un segment de son histoire, nous serions surpris que même Jésus aurait pu être qualifié de violent si on ne se réfère qu’à l’épisode du temple.

Pour se faire un jugement précis, il faut prendre en compte la totalité des actions d’une personne.

Pourquoi nous, Africains, devrions célébrer la mémoire de Mugabe

Que l’occident diabolise Mugabe, c’est tout à fait compréhensible mais que des Africains se joignent à lui sans user de perspectives, c’est triste.

Bob Marley chantait : ” Pendant combien de temps tueront-ils nos prophètes. Alors que nous sommes juste à côté et que nous regardons ?”

Tuer, ce n’est pas juste l’élimination physique comme ce fut le cas pour Thomas Sankara ou Patrice Lumumba. Ternir la réputation peut aussi causer des dégâts considérables.

Aussi longtemps que nous baserons nos opinions, sur les classifications faites par les européens (motivées par leurs intérêts), nous participerons, au lynchage de nos dirigeants, et à la célébration des leurs.

« Tant que les lions n’auront pas d’historiens, l’histoire de la chasse sera toujours à la gloire du chasseur » disait le dicton africain.

Valery Giscard d’Estaing, dont la présidence fut ponctuée de nombreux scandales (l’affaire des diamants de Bokassa entre autres), est célébré en Afrique. En Côte d’ivoire, un boulevard porte son nom. On peut aussi trouver, des écoles, portant le nom de colons, dont nous ne savons pas grand-chose, mais qui furent reconnus comme hérosDans le dictionnaire Larousse, la définition de héros est la suivante : Celui qui se distingue par ses exploits ou un courage extraordinaire”.

À mes yeux, Robert Mugabe répond à ses critères. C’était un héros avec certes des zones d’ombre, mais il reste un héros africain qui s’est battu pour nos droits.Nous devons nous ”affranchir de l’esclavage mental ”et raconter nous-même notre histoire.

Repose en Paix Mugabe.

FORTNITE:PLONGER DANS L’UNIVERS DE NOS ADOS

credit:epic games

« Kills »,  « headshot », et autres mots pas courants résonnent dans votre maison ? Ne vous inquiétez pas, votre ado n’a pas été recruté par une organisation terroriste.

Danses aussi excentriques les unes que les autres exécutées par lui de façon aléatoire ? non ne vous inquiétez pas, votre adolescent ne perd pas la tête.

Comme tous ceux de son âge il est sous l’emprise du jeu Fortnite.

Fortnite , le Phénomène

Fortnite,vous en avez certainement entendu parlé si vous avez un ado chez vous. Sinon, ce n’est pas un ado que vous élevez, mais un saint. Vite ! Faites une statue à son effigie, et placez un cierge devant elle.

Pour ceux qui élèvent des ados normaux comme moi, Fortnite rythme le quotidien depuis quelques années. Les parents indignes comme moi, l’utilisent comme arme de chantage : « fais tes devoirs sinon pas Fortnite, range ta chambre sinon… »

Et elle se révèle être très efficace.

On peut le dire sans risquer de se tromper, Fortnite mobilise plus de 80% du cerveau de nos ados.

Quand ils ne jouent pas à Fortnite, ils regardent Fortnite sur les écrans de leurs téléphones, quand ils ne regardent pas ils en parlent, quand ils n’en parlent pas ils en rêvent. Fortnite nous est servi sous toutes les coutures. En tant que parent, on peut se sentir démuni, de voir son adolescent happé par ce système. Surtout quand on se rend compte, que les interdictions n’ont aucun effet sur eux, et qu’ils trouveront un moyen détourné de céder à la tentation.

N’étant pas à arriver à rivaliser avec Fortnite, vu que la bataille n’était pas équitable, j’ai décidé d’essayer de comprendre l’engouement de mon fils de 12 ans pour ce jeu.

Que lui apporte-t-il ? acquiert-il des notions pouvant lui être utile à l’école ? dans la vie de tous les jours ?

« Fortnite c’est l’école idéal »

Évoquer Fortnite est une façon très pratique de se « connecter « avec son ado.

Quand j’ai fait part à mon fils de mon désir d’écrire sur Fortnite, il avait du mal à contenir son enthousiasme.

C ’était très gratifiant pour lui d’être le maitre et moi l’élève.

En plus savoir que je m’intéressais à son univers était plutôt « Cool » pour lui emprunter son expression.

À l’entendre, Fortnite pourrait pratiquement remplacer l’école.

Selon ses dires, Fortnite a affûté son esprit stratégique. Forger son esprit d’équipe et lui permet de pratiquer des langues étrangères.

Ses arguments suffiraient il à classer Fortnite dans la catégorie jeux éducatifs ?

Fortnite fait mieux que l’union européenne

Ce jeu a des points positifs qu’on ne peut pas ignorer.

Les joueurs viennent du monde entier ce qui permet de pratiquer l’anglais, le français et pour les plus téméraires, le chinois et tout ça de façon ludique.

Fortnite a aboli les frontières linguistiques et géographiques et fait plus que l’union Européenne.

Contrairement au géant européen Fortnite ne fait face à aucune cacophonie, aucune tentation de fort-Xit  (en référence au Brexit).Tous les joueurs adhèrent à une charte commune, et vise le même objectif :  rester le dernier survivant sur l’ile.

Sur l’ile on accueille toutes les races, toutes les nationalités et pas besoin d’essayer d’attendre l’ile à la nage ou faire la queue pour obtenir un visa. Tous les joueurs sont logés à la même enseigne. Dans Fortnite tous les joueurs naissent égaux en droit.

Le programme est bien défini et fait l’unanimité.

Fortnite un business royal

La version battle royale, la gratuite, est de loin la plus populaire. Pour acquérir des « battle pass » il faut cependant débourser des sous. Mais qu’importe !

Des joueurs du monde entier s’y affrontent. Arborant le même vocabulaire, les mêmes danses. Les adeptes de la secte Fortnite se comprennent.

On peut jouer en Duo,en squad ,ou en solo.

Les joueurs au nombre de 99 sont parachutés depuis un bus volant sur une ile.

Ils devront user de stratégies pointues, pour se fournir des munitions à utiliser pour:

Se défendre ou attaquer.

Éviter la tempête qui frappe l’ile après leur arrivée.

Pour construire des bâtisses.

Contourner les pièges.

Depuis le bus, une carte est mise à leur disposition, pour leur permettre de choisir un lieu d’atterrissage propice. Ils auront accès à cette carte, tout le long du jeu, pour localiser les points chauds, et déterminer leur trajectoire.

Le jeu, allie géographie, finesse, dextérité.

Il ne suffit pas d’amasser des munitions, il faut savoir les manier, les utiliser au bon moment et à la bonne distance.

Muni d’un « shotgun «, on peut faire plus de dégât sur l’ennemi, avec un « headshot ».

Des termes récurrents dans le langage des joueurs de Fortnite, qu’ils hurlent de plus en fort, lors de leur transfiguration, pendant les parties agitées.

Et puis, Fortnite n’est pas « violent « comme les autres jeux de combats. On élimine les adversaires, sans ne se salir ni les mains, ni la belle ile, car dans Fortnite, on ne voit pas de sang et les cadavres s’évaporent. Comme si ses deux éléments étaient la définition de la violence.

Si Fortnite a fait mouche auprès des adolescents, ce n’est pas le fruit du hasard. Epic games et ses développeurs ont mis le paquet. Côté esthétique, les costumes et les héros sont attirants, et il y a une histoire avec un fil rouge, ce qui lui donne un plus non négligeable.

Une mise à jour constante de l’ile permet aux joueurs, de faire face à de nouveaux défis.

Fortnite c’est aussi un business. Des joueurs de jeux vidéo aux noms irréels comme Gotaga , Ninja ont amassé une fortune rien qu’en y jouant. On les appelle les youtubeurs ou influenceurs. Ils participent aux compétitions et distillent des recommandations en tant qu’experts reconnus à leurs fans ou abonnés.

La majorité des enfants qui y jouent espèrent secrètement atteindre ce niveau de notoriété et de gloire. Comment les blâmer dans cette société du m’as-tu-vuisme ?

Fortnite on y joue ?

M’essayer à Fortnite pourquoi pas ?

Devenir experte ? Mission impossible pour moi. Le nombre de boutons à triturer sur la console pour arriver à quoi que ce soit, les instructions, les pièges à éviter… tout cela m’a donné le tournis.

Je ne risque pas de me convertir à la religion de Fortnite, mais je ressors de cet article moins bête.

En tant que parent, je continuerai de composer avec Fortnite, car chaque génération à ses centres d’intérêts. Et puis, on n’arrête pas le progrès.

Mais,tout est dans le dosage, car l’excès peut nuire.

Limiter le temps d’accès pour que notre ado puisse faire autre chose de ses journées est notre responsabilité en tant parent.

Bonne rentrée ponctuée de Kills, de shots, hype, take the L, Zany, joie, amour, retrouvailles, soleil.

Du bleu pour couvrir le rouge du sang soudanais

Le 03 Juin 2019 ,nous avons tous été confrontés à l’horreur d’une dictature se mettant en place. La manifestation pacifique des soudanais a été réprimée dans le sang par la junte militaire. Bilan plus de 100 morts sans compter les viols et les rapts.

#Blue for Sudan

La réponse à cette barbarie fut la naissance de l’hashtag #Blue for Sudan. Les réseaux sociaux se revêtirent de drap bleu, pour soutenir les braves soudanais.

Et pourtant quelques semaines plus tôt, dans ce fast Food médiatique et le suivisme qui en découle, nous avions célébré la destitution de Omar Al-Bashir ,qui sonnait croyions nous naïvement la fin des tracas du peuple soudanais. Et puis, nous trouvâmes rapidement autre chose à nous mettre sous la dent.

Pendant que nous vaquions à nos occupations, les Soudanais eux, étaient sur leur garde car comme le dit le proverbe “qui a été mordu par le serpent, se méfie du ver de terre.” Bashir avait été mis hors d’état de nuire certes, mais le pouvoir n’était pas encore aux mains des civils condition sine qua non ,pour accéder à la démocratie.

Révolution de sensibilisation (awareness)

Pour faire plier les militaires, une révolution de sensibilisation s’est mise en place. Le peuple soudanais débout, comme un seul homme, affiche sa défiance aux militaires qui à court d’arguments, le réprimande brutalement.

Comment comprendre cette schizophrénie des militaires qui massacrent un peuple qu’ils prétendaient soutenir?

La soif du pouvoir sans doute ? Et si on donnait la parole aux Soudanais, histoire d’y voir plus clair ?

La Parole aux soudanais

Mugtaba Bandas a 25 ans. Il a fait ses études d’ingénierie à l’Université du Soudan pour les Sciences et la Technologie de Karthoum et a obtenu son diplôme en 2015. L ‘année dernière (2018), il a dû se rendre aux Emirats Arabes, faute d’avoir pu obtenir un travail au Soudan.

Pour la première fois, il est hors de son pays pendant une révolution. Le soudan a connu plusieurs mouvements de résistance.  Mugtaba a participé à ceux de 2013 et 2016.  Ne pouvant se contenter d’être spectateur, il est actif sur les réseaux sociaux 24h/24h ,pour partager, relayer les informations. Depuis la révolution égyptienne, on sait que les réseaux sociaux peuvent être un levier non négligeable pour faire bouger les lignes. Ce n’est pas fortuit si l’internet a été coupé au Soudan. # internet blackout sudan.

Je l’ai repéré grâce à son dynamisme en ligne. Et il a sans hésiter accepté de répondre à mes questions.

 Le frère de Mugtaba a fait un tour dans les geôles soudanaises il y a quelques semaines avant d’être relâché.

« Les militaires et Omar al-Bashir sont les deux faces de la même pièce. Ils l’ont juste renversé pour s’emparer du pouvoir et non en soutien au peuple », clame Mugtaba. « Nous ne sommes pas dupes et ne les laisserons pas faire », poursuit-il.

« Nous ne voulons ni de Bashir , ni de ses sbires.  Le peuple soudanais ne fera pas de compromis sur ses droits fondamentaux. »

De ma conversation avec Mugtaba ressort la détermination du peuple soudanais. Un peuple fatigué de la dictature que ni les viols, ni les rapts , ni les meurtres ne sauraient  arrêter dans sa  recherche de liberté.

« C’est une révolution pacifique… pour obtenir justice »

« Il est important de souligner le caractère pacifique de ce mouvement » martèle Mugtaba Malgré les brimades, nous ne répondrons qu’avec la paix pour seule arme. « Le sang du peuple soudanais a déjà assez coulé et nous ferons tout pour éviter qu’il ne coule davantage. »

“Quand un manifestant ose brandir une pierre, il est mis à l’écart poursuit Mugtaba .Face aux armes, nous répondons avec des fleurs. Le changement se fera dans la non-violence.

À la question de savoir ce que le peuple soudanais attend de cette révolution, il répond: « La justice, la démocratie, la paix c’est une révolution de sensibilisation(awareness) .Le peuple ne veut plus de régime militaire et veut pouvoir décider de son destin en toute liberté. Nous n’avons pas tenu tête à Omar al-Bashir pour en arriver là. »

Soutenir la révolution soudanaise

La cause est tellement noble qu’on a qu’une envie, y participer. Mais comment ?

 « Tout le monde peut aider à sa façon en se faisant l’écho de la situation, en partageant les informations relatives à la révolution, en sensibilisant son entourage au sort du peuple du soudanais » affirme Mugataba

« Nous sommes touchés par les soutiens que nous recevons du monde entier. Nous espérons que cela continuera. Nous, de notre côté nous ne baisserons pas les bras. Même s’il ne reste plus qu’un seul soudanais sur la planète, il portera le flambeau de la révolution », ajoute Mugtaba.

Mugtaba a tenu à préciser qu’il ne désirait pas prendre de place dans cet article. J’ai dû insister pour mentionner son nom. Ce n’est pas par crainte de représailles car “entre la mort et perdre son âme “son choix ne souffre d’aucune ambigüité. Mais plutôt parce qu’il veut que la lumière soit faite sur la révolution. « Je veux qu’on parle de la révolution, c’est elle la star. Je ne dois lui faire aucune ombre. C’est la révolution qui doit faire l’objet d’attention et non ma personne », conclut-il.

Le Soudan, notre bien commun

Nos yeux ne doivent pas se détourner du sort du peuple soudanais.

Le voir libre doit nous concerner tous. Le soudan est notre bien à tous.

En se plongeant dans l’histoire dense de ce pays, on comprend qu’il doit occuper une place de choix dans le cœur de tout africain.

Anciennement Nubie, ce grand pays d’Afrique, pas seulement à cause de sa superficie, mais aussi son histoire, a abrité la partie la plus glorieuse de la civilisation noire. De son sein a émané les plus grands royaumes : Kush, Kerma, Napata, Meroe, une dynastie de pharaons noirs comme Piye, Taharka et une lignée de candaces les fameuses reines guerrières.

La civilisation meroitique était très avancée, avec un modèle d’égalité hommes-femmes, à faire pâlir les féministes des temps modernes. Les femmes avaient le droit de diriger, au même titre que les hommes. Grâce à ce système, de grandes reines comme Amanirenas ont pu voir le jour. Cet article ne suffira pas à couvrir l’histoire riche du soudan .Ce n’est qu’une ébauche pour montrer que le Soudan est le berceau de notre civilisation longtemps niée . Soutenir ce pays c’est aussi protéger notre héritage .

Contribuer à une issue heureuse de la révolution en diffusant les informations est notre devoir à tous. Le sang des soudanais ne doit pas couler en vain.

Portons leur voix !

Ensemble soutenons les !

C’est Mon soudan, Ton soudan, Notre Soudan.

#ImTheSudanRevolution
#Watch_sudan_in_30june
#Internet_blackout_in_sudan
#BlueForSudan
#civil_disobedience_in_sudan

Le règne des postérieurs sur les réseaux sociaux : comme un air de Sara Baartman

Connaissez-vous l’histoire de Sara Baartman ? Cette jeune sud-africaine qui fut exposée en Europe comme un animal? Capturée ou arrivée de son plein gré en Europe ? Les versions divergent, mais elles convergent sur une chose essentielle, la vie de cette femme, n’a été que successions de souffrances graduelles qui firent d’elle le symbole du racisme scientifique. Même la mort, qui est censée être la délivrance ultime, ne put mettre fin à son calvaire.

Qui était Sara Baartman ? Comment arrive-t-elle en Europe ?

Sara Baartman était une jeune femme Khoi- san.(mélange formé par les bergers nomades khoikhoi et les chasseurs San). Elle naquit en 1789 en Afrique du sud, où elle passa sa vie aux services de ses maitres.

Même si son existence en Afrique du Sud fut loin d’être un long fleuve tranquille, elle prit un tournant dramatique quand Alexander Dunlop, l’ami de son employeur Hendrik Cezar, vit en elle un potentiel pouvant être exploité en Europe, et convainquit ce dernier de l’emmener avec lui à Londres.

 À l’époque, les « freak show « prenaient de l’ampleur en Europe, et Dunlop voyait en elle, la candidate idéale.

En effet, les explorateurs avaient déjà semé, par leurs écrits et leurs récits, une fascination autour des attributs physiques « hors normes » des femmes de sa tribu :

Fessier développé(stéatopygie) et hypertrophie des petites lèvres (macronymphie).

Si bien, qu’ils étaient passés de mythe à obsession. Les deux amis lui firent signer un contrat, lui faisant miroiter une vie de star.

En 1810, quand Sara prenait ce bateau pour Londres, elle n’avait pas idée qu’elle deviendrait l’objet de tant de fascinations à tendances voyeuristes.

Elle ne savait pas que sa différence allait être scrutée, analysée, disséquée. Sara ignorait que la notoriété qu’on lui avait promise, se ferait à ses dépens.

Sara Baartman , une « vénus Hottentote »à Londres

Une fois à Londres, elle fit diverses représentations, dans lesquelles, elle fut présentée comme une bête de foire.  Elle n’était pas nue lors de ses représentations, mais vêtue de façon légère et suggestive, laissant peu de place à l’imagination. Les affiches publicitaires qui la représentaient, mettaient en exergue, ses formes généreuses et ses origines « hottentotes », nom péjoratif donne aux khoi Khoi par les colons hollandais. Elle fut baptisée « la vénus d’hottentote » sur scène, pour accentuer la moquerie.

Les représentations de Sara avaient la côte en Angleterre. Y était-elle contrainte ? était-elle rémunérée selon le contrat ? difficile à dire même si on peut aisément en douter.

Une petite lueur d’espoir se présenta, quand ses conditions de travail furent remarquées par African association qui intenta un procès à ses maitres/imprésarios, pour exploitation.

Si on peut être impressionnés par l’avant-gardisme de l’Angleterre, en matière de droits humains, du fait de la tenue de ce procès en 1810, force est de constater, que Sara s’est vue imposer deux choix :

Retourner dans son pays et être esclave ou rester en Angleterre pour faire ses spectacles et être à la merci de ses imprésarios.

Elle a sans doute cru choisir le moins pire des deux.

 À la barre Sara admit être consentante. Selon ses dires, ses conditions, lui allaient bien hormis le manque de vêtements chauds. Elle resta alors en Europe.

Et si elle avait voulu rester en Angleterre mais avoir un contrat revisité ? ou construire une vie de femme libre ? Ces options elle ne les aura pas.

La résistance de Sara Baartman face aux scientifiques

L’intérêt pour son show s’étant décru en Angleterre, elle se retrouva en France, où elle tomba, dans les filets de Reaux, un montreur d’animaux. Une fois de plus, elle fut exhibée pour son anatomie, dans des conditions pires qu’en Angleterre. Comble du malheur, elle croisa le chemin des scientifiques Georges Cuvier et Geoffroy Saint- Hilaire, à la recherche de cobayes pour étayer leurs thèses racistes.

Pour eux, cette femme « hottentote » était une manne scientifique, dont ils avaient hâte de se délecter. Ils nourrissaient l’espoir de voir ce fameux « tablier hottentote », appellation donnée par les Européens aux parties génitales des femmes Khoi san, du fait de l’élongation de leurs lèvres. Alors qu’ils pensaient pouvoir accès à son corps et s’en servir à leur guise, Sara refusa de céder à leur curiosité malsaine. Elle opposa un refus catégorique à leur requête de dévoiler ses parties intimes. Ils essayèrent même de la convaincre, en lui donnant de l’argent, mais rien n’y fit, elle resta ferme sur sa décision. Ce qui les laissa sur leur faim.

La dépouille de Sara marquée au fer du racisme scientifique par Georges Cuvier

Rongée par ses conditions de vie, cocktail malheureux d’eau de vie, prostitution, maltraitance, rêves brisés, l’étoile de Sara s’éteignit à Paris en 1815. Pour tout être humain, le voyage dans l’au-delà signifie la fin du calvaire sur terre, mais pour Sara cela ne fut pas le cas.Sa mort fut une aubaine pour le scientifique Cuvier, qui eut les mains libres pour poursuivre ses recherches sans avoir à subir ses protestations.

Après avoir disséqué son corps le père de l’anatomie comparée lui écrivit une oraison funèbre, qui a toute sa place dans les annales du racisme scientifique.

Ce rapport intitulé « Extrait d’observations faite sur le cadavre d’une femme connue à Paris et à Londres sous le nom de Vénus Hottentote. » bien qu’abject ne fut qu’un reflet de l’époque.

Déshumaniser l’autre quitte à utiliser des raccourcis, des classifications arbitraires et confuses.

Contrairement à ce qui se lit un peu partout, Cuvier n’a pas qualifié Sara de chainon manquant étant donné qu’il n’était pas évolutionniste. Mais il ne fit pas mieux. Il lui trouva des similitudes avec les primates.

Dans son rapport(https://archive.org/details/bub_gb_R2q2Weu3Q4IC/page/n5 )dont la lecture m’a soulevé le cœur et d’autres organes à moi inconnus, la jeune femme  est décrite de façon simiesque. « Ses mouvements avaient quelque chose de brusque et de capricieux qui rappelaient ceux du singe. »

 Ses traits physiques n’échappèrent pas au jugement subjectif du scientifique «  Ce que notre Boschimane avait de plus rebutant, c’était la physionomie. (…) Je n’ai jamais vu de tête humaine plus semblable aux singes que la sienne … »

Le procureur scientifique Cuvier prononce ses sentences :« ils ne faisaient pas exception à cette loi cruelle qui semble avoir condamné à une éternelle infériorité les races à crâne déprimé et comprimé. »

À l’aide d’un exercice périlleux appuyé par la craniométrie il profite pour dire que les noirs ne pouvaient pas être à l’origine de la civilisation Egyptienne(blasphème suprême !) comme l’affirmait l’explorateur écossais James Bruce « Ce qui est bien constaté dès à présent,.., c’est que ni ces Gallas ou ces Boschimans, ni aucune race de nègre, n’a donné naissance au peuple célèbre qui a établi la civilisation dans l’antique Égypte, et duquel on peut dire que le monde entier a hérité les principes des lois, des sciences, et peut-être même de la Religion… »

Même s’il reconnait son intelligence. Elle parlait trois langues et avait une bonne mémoire visuelle. L’éminent professeur restera fidèle aux dogmes racistes véhiculés .Le danger est que ces paroles émanant de scientifiques étaient considérées comme parole d’évangile et distillées dans l’opinion publique.

Elles furent même reprises des années plus tard par d’autres chercheurs biberonnés au racisme scientifique et inscrites dans les manuels. Ce passage ne fut pas le dernier calvaire de Sara. Ses restes furent exhibés comme un trophée de guerre au musée de l’homme à Paris. Ce ne fut qu’en 2002, qu’elle elle put enfin retrouver sa terre natale.

Sara Baartman à l’ère des réseaux sociaux

De nos jours la stéatopygie fascine toujours, elle n’est plus le trait distinctif des « Boschimanes » mais s’étend à toutes les régions, toutes les cultures aux quatre coins du globe.

Elle est même génératrice de revenus alors les moins loties n’hésitent pas à avoir recours au bistouri ou à des crèmes miraculeuses.Les freaks shows se sont déplacés du monde réel au monde virtuel. Dans ce monde-là, Il est difficile de démêler le vrai du faux, le libre de l’opprimé tant l’illusion et le faire semblant sont la norme.

Si Sara Baartman avait été sur les réseaux nous y serions allés de nos commentaires graveleux, aurions partagé ses photos, nous aurions participé à sa dissection publique, comme nous le faisons aujourd’hui pour nombre de femmes se croyant libres mais qui sont en réalité prisonnières de leurs postérieures et du rôle qu’on veut leur faire jouer. Un rôle dont elles pensent pouvoir tirer profit mais qui les dépasse.

Et si nous faisions attention à ne pas être complices des Cuvier, Reaux, Dunlop et autres tapis dans l’ombre ?Repose en Paix Sara Baartman et puisse le monde apprendre des souffrances qui te furent infligées.